Justesse, tel est le mot qui résume le mieux Garden State, un film qui a la particularité de sembler à la fois étrange et tendrement familier, à l'instar de ses personnages, décalés mais bien réels.

L'intelligence de Zach Braff réside dans sa volonté de raconter une histoire avant de véhiculer un message. Le film n'en est pas dépourvu, loin de là, mais le sens est distillé de façon subtile, en filigrane, à travers des dialogues qui ont leurs raisons d'être et n'ont justement pas été écrits pour asséner des vérités.

Et de fait, chaque phrase, chaque réplique, drôle triste ou agacée est caractérisée par une sincérité qui fait qu'on est d'entrée de jeu porté par celui des acteurs et par cette narration parfois faite en implicite. L'avancée du scénario vers un final que l'on peut juger un peu niais - il n'en est rien - est joliment faite. Comme son héros, Garden State est un film qui sort de son cocon chimique pour se reconnecter avec le monde, passant de la drôlerie neurasthénique façon Droopy à ce mélange de tendresse et de douleur qu'est le quotidien, encore une fois tout en justesse.

Cette justesse caractérise le film jusque dans ses aspects les plus techniques, où chaque effet de mise en scène (la chemise, la fête) n'est jamais gratuit, démonstrateur d'un savoir faire, mais bien au service des personnages, de leur point de vue comme de leur état d'esprit. Une façon de faire qui rend la réalisation incroyablement naturelle mais jamais plate, remarquable dans sa capacité à justement ne pas se faire remarquer.

De même qu'on aurait plus de mal qu'on ne l'imagine à classer Garden State dans un genre : il ne s'agit pas de comédie, il ne s'agit pas de drame... il s'agit juste d'un moment de vie.

C'est, à mon sens, là toute la force de Garden State : presque faire oublier que l'on regarde un film, pour mieux nous montrer des personnes.

Ce film est en effet d'une justesse saisissante! Il semble que chaque regard, chaque parole, chaque geste soit vrai et l'on aurait presque du mal à se souvenir que ce n'est pas la vraie vie qui se joue sous nos yeux mais bel et bien un film.
La mise en scène s'imprègne de l'émotion et des sensations du personnage et on a l'impression de voir à travers ses yeux. Tantôt tout est flou et va à toute vitesse, tantôt les choses s'illuminent au gré d'un sourire. Ce film est impressionnant de justesse car les scènes les plus fantaisistes ne perdent pas une seule seconde de leur sincérité, au contraire. Zach Braff donne une profondeur à son personnage en perte/quête de repères et Nathalie Portman dans le rôle de Sam est juste magnifique.

Je me force à ne pas dessiner, en guise de critique, un énorme cœur au milieu de cette page mais je n'en pense pas moins : ce film est un petit bijou à l'état pur, qui me touche énormément et me fait vibrer à chaque visionnage. J'ai regardé certaines scènes des dizaines de fois, à moitié subjuguée par les dialogues doux-amers, souvent douloureux mais tellement justes et pleins d'espoir. Et puis, il y a ces moments totalement décalés qui font sourire, comme cette scène inoubliable des "gestes que personne n'a jamais faits jusqu'à maintenant" dans la chambre de Sam. Ce film est un véritable petit morceau de vie, un mélange de tendresse et de douleur...

Beaucoup disent que Garden State est le film d'une génération : celle des 18-25 ans actuels, souvent perdus, qui souffrent d'un certain mal-être et veulent trouver un sens à leur vie. C'est peut-être vrai. Toujours est-il que le traitement original de l'histoire en fait un film universel, frais et lumineux, servi par une musique magnifique (l'album de la B.O. est à recommander) et des acteurs au meilleur de leur forme : Zach Braff se fond complètement dans le personnage attachant de "Large", et Nathalie Portman est tout simplement éblouissante. Un vrai coup de cœur <3