La vérité sur l'Affaire Harry Quebert |

Année : 2012
Langue d'origine : Français










5/10 (1 critique)
Histoire :
Tourmenté par le syndrome de la page blanche, Marcus Godman, un jeune écrivain à succès, va chercher conseil et inspiration auprès de son ancien mentor et professor, Harry Quebert, écrivain éminemment respecté. Lorsque le corps d'une jeune fille de 15 ans avec qui Quebert aurait eu une liaison 30 ans plus tôt est retrouvé dans son jardin, Marcus laisse tomber son livre en cours pour reprendre l'enquête de son coté et tenter de faire innocenter son modèle.
Critique par Julie postée le 24-03-2013 à 16:52 Note : 5/10 | |
Si je peux adorer le travail de certains auteurs, j’adore rarement des auteurs pour avoir comme principe de ne pas chercher à connaître la personne derrière le livre. Exceptionnellement, c’est pourtant en découvrant Joel Dicker sur un plateau télé que j’ai eu envie de bouquiner sa Vérité sur l’affaire Harry Quebert. En effet, de tous les invités de cette émission littéraire (d’ordinaire ennuyeuse à préférer relire du Robbe-Grillet) il était le seul à parler d’écriture avec enthousiasme, à évoquer le plaisir, et tout particulièrement celui de raconter des histoires. Et c’est cet enthousiasme qui m’a fait tenir sur le premier tiers du roman, point de non-retour où l’envie de connaître le fin mot de l’histoire vous fera tourner les 400 pages restantes. J’ai ainsi lu de bout en bout La Vérité sur l’affaire Harry Quebert portée par des attentes différentes au fil de la lecture. Car arrivée à ce premier tiers, je n’avais plus grand espoir de découvrir le chef d’œuvre partout porté aux nues… Si Joel Dicker semble en effet adorer raconter des histoires, on peut se demander si écrire reste le vecteur le plus approprié, tant son style est confondant de platitude. La seule chose qui empêche le pavé de ressembler à un script romancé est l’emploi de la première personne. Marcus Goldman, l’écrivain narrateur, est d’ailleurs la plus belle réussite romanesque du livre : en le posant presque d’entrée de jeu comme un imposteur, en osant le descendre du piédestal de l’écrivain talentueux (on y reviendra) pour le rendre ça et là méprisable, Dicker en fait un personnage nuancé et, à défaut de véritablement attachant, intéressant à suivre. Certains ont vu dans cette peinture glorifiée de l’écrivain millionnaire un fantasme de la vie d’auteur à succès, en ce qui me concerne j’y vois une ironie volontaire, d’autant plus mis en vis-à-vis avec le caractère « frauduleux » explicite de Goldman. Et cette ironique, ces petits coups frappés au 4ème mur pour parler écriture, narration, histoires… et triche, ont fait pour moi le charme du début du roman, voire justifiaient à mon sens le style plat, comme un pied-de-nez de plus, une dénonciation de ces livres plats qui font réellement de leurs auteurs des millionnaires. Sauf que non. Pas une page ne vient confirmer cette idée et au final, cette médiocrité stylistique n’a rien d’un outil, reflétant juste le manque d’imagination de l’auteur pour ce qui est des mots en eux-mêmes. Le style devient même un très sérieux handicap dès lors que Dicker entrecoupe son récit d’extraits des Origines du mal, le roman d’Harry Quebert, supposé chef d’œuvre de littérature, classique instantané, d’une pauvreté littéraire abyssale. Ces Origines du mal cristallisent plutôt bien tout ce qui pêche par la suite : le roman est supposé raconter la romance entre Nola (la victime par qui tout démarre) et Harry, seul fait avéré d’entrée de jeu. Cet amour fou qui aurait retourné un été durant toute la ville et provoqué une série Evénements dramatiques n’est absolument pas rendu dans le livre. Jamais Dicker ne nous montrera pourquoi ils s’aiment, sur quoi s’est construit cet amour, limitant sa démonstration à des scènes montrant Nora et Harry se dirent qu’ils s’aiment. Allant à l’encontre du « show, don’t tell » qui fait les histoires bien écrites, c’est le cœur même de son intrigue que Dicker affaiblit, mais aussi toute sa réflexion voulue sur la littérature et les liens qu’elle entretient avec la vie. De sorte que La Vérité sur l’affaire Harry Quebert finit par passer à coté de son sujet. Que reste-t-il alors ? Une construction bien pensée, des idées narratives louables (faire de la ville une sorte de personnage) et une sincérité, qui ne fait pas le talent mais excuse beaucoup de choses. Au fond, s’il l’on avait découvert Harry Quebert par hasard, sans les attentes légitimes d’un roman primé par l’Académie française (incompréhensible) on l’aurait sans doute lu pour ce qu’il est : un honnête polar écrit au premier degré par un passionné. Et c’est plus que ne peuvent revendiquer bien d'autres titres présentés sur les plateaux télé. Votre avis rejoint-il cette critique ? |