Persuasion n'est pas un film, mais un téléfilm produit par la BBC, dont les adaptations de classiques anglais sont nombreuses et très souvent de grande qualité. En France, comme la plupart de ces adaptations, il est édité par Koba films.

D'ordinaire, je lis l'ouvrage avant de regarder le film : je me suis lancée dans celui-ci en étant persuadée (c'est le cas de le dire, ah ah) d'avoir déjà lu l'oeuvre éponyme de Jane Austen. Il ne m'a pas fallu longtemps pour m'apercevoir de mon erreur, et pour me plonger dans l'histoire avec toute la passion de la découverte.

La surprise ne s'est pas arrêtée là : alors que je m'attendais à suivre une comédie romantique plaisante et somme toute légère, comme le sont d'ordinaire les histoires de Jane Austen, je me suis retrouvée happée dans un drame psychologique emprunt de tristesse et de nostalgie, porté par une musique omniprésente qui invite à l'introspection.

Dans cette histoire, l'héroïne n'est plus aussi jeune qu'une Lizzy Bennett, plus aussi belle qu'une Fanny Price. Usant des gros plans presque à outrance, la caméra s'attache sans cesse à ce visage fatigué par la vie et les soucis, habité par le souvenir tenace de son amour perdu. Elle suit les pas d'Anne Elliot dans chacun de ses errements angoissés, depuis l'état des lieux du petit manoir de campagne qui ouvre le film, jusqu'à la folle poursuite dans les rues de Bath à la fin de l'histoire. Et c'est dur de ne pas se mettre à pleurer en même temps qu'elle lorsque de grosses larmes s'écrasent sur les pages de son journal intime, après sa rencontre avec Frédérick... L'émouvante Sally Hawkins a d'ailleurs reçu un prix d'interprétation pour ce rôle.

Difficile de savoir si l'adaptation est restée fidèle lorsqu'on n'a pas lu le livre. Cependant, les partis pris de la réalisation rendent le film extrêmement introspectif, et le teintent d'une amertume qui, à mon avis, n'est pas absent du livre. Jusqu'à la fin, la tension est maintenue, et si, comme dans toutes les histoires de Jane Austen, le happy end est bien présent, il s'en faut cette fois-ci vraiment d'un cheveu. Dans le film, Anne n'hésite d'ailleurs pas à passer outre la bienséance de l'époque pour obtenir le bonheur qu'elle mérite.

Mentionnons également un Anthony Head excellent dans son rôle de père vaniteux à l'extrême (dommage qu'on le voit si peu) et un Rupert Penry-Jones (mais si, Adam dans Spooks !) tellement bien dans le ton d'époque qu'il est difficile de ne pas en tomber amoureuse dès le premier plan.

Des défauts ? Il y en a, évidemment. Celui de tomber parfois un peu trop dans le pathos, lorsque quelques secondes de moins au montage auraient largement suffi. Et puis, en parlant de montage, ces coupes brutales, qui font passer le spectateur d'une ambiance à l'autre avant qu'il comprenne ce qu'il s'est passé, sont... surprenantes. Enfin, une heure trente est trop peu pour s'imprégner réellement de l'histoire, et un second visionnage m'a été nécessaire pour comprendre les liens de parenté et d'amitié entre chaque personnage.

Mais, pour pallier à cela, je n'ai plus qu'une chose à faire : me plonger sans attendre dans le roman de Jane Austen.