Du 8 au 29 novembre 2011, le cinéma japonais est à l'honneur
à Paris et dans quelques autres villes de France. A 4€ seulement
la place, le festival Kinotayo donne la possibilité à tous
(et pas seulement aux journalistes et spécialistes du genre !)
de se plonger dans l'atmosphère nippone et de découvrir
quelques films qui ne passent pas habituellement dans nos salles françaises...
Pourquoi s'intéresser au cinéma japonais ?
Le cinéma japonais est d'une extrême richesse : qu'ils soient
contemplatifs, déjantés ou provocateurs, les films japonais
dévoilent toujours un petit bout de culture nippone et les traditions
d'un pays très différent du nôtre. En ce qui me concerne,
les premières sonorités de la langue japonaise suffisent
généralement à me plonger dans une autre ambiance...
sans pouvoir me l'expliquer, mes sens se mettent aux aguets et absorbent
tous les détails à l'écran : la douceur de la lumière,
les tatamis au sol ou le papier de riz sur les murs, les habits des personnages,
les paysages urbains ou ruraux...
Les films japonais
exportés à l'international ne sont peut-être pas représentatifs
de tout ce qui se fait dans le pays. La plupart des films qui passent
les frontières et aterrissent dans nos salles de cinéma
sont en effet des films contemplatifs, à l'instar des long-métrages
du réalisateur Hirokazu Kore-Eda (Nobody Knows, Still
Walking, After Life) qui sont des exemples du genre. La caméra
s'attarde sur chaque seconde et sublime le moindre geste. Les sujets sont
souvent graves, au plus proche des sentiments des personnages, de manière
à exposer l'âme humaine dans ce qu'elle a de plus sincère
et de plus élémentaire. Avec une sensibilité à
fleur de peau, ces films sont faits de silences et de réalisme,
plus proche du cinéma d'auteur français que du grand drame
américain. (Il faut parfois s'accrocher pour suivre le rythme lent
et tragique de certaines situations, comme dans le singulier Nobody
Knows).
Le respect de la nature est un thème qui transparait énormément
dans le cinéma japonais. Là,
je citerai évidemment le grand Hayao Miyazaki, réalisateur
entre autres de Mon
voisin Totoro, Princesse Mononoke ou encore Ponyo
sur la falaise, qui montrent tous la position de l'homme par
rapport à une nature bienveillante avec laquelle il faut vivre
en harmonie. Dans Totoro, de gentilles créatures qui vivent dans
la forêt apprennent à deux fillettes à surmonter la
dure réalité de la vie. Dans Mononoke, les dieux de la nature
(représentés par des loups géants, des sangliers
ou des cerfs) se battent contre des humains qui cherchent à envahir
leur territoire et détruire leur forêt. Enfin dans Ponyo,
c'est l'océan qui sert de décor au message écologique
de Miyazaki.
Mais il n'est pas nécessaire de regarder des oeuvres si spécifiques
pour voir abordés les thèmes du respect de la nature et
des traditions. Dans beaucoup de films, on trouve en arrière-plan
une référence aux croyances religieuses, aux montagnes japonaises
(lieu où vivent les ancestres), un retour aux sources...
Mais tout n'est pas rose
et sensible au pays du soleil levant, et c'est d'ailleurs ce qui rend
le cinéma japonais si riche et intéressant. S'ils sont capables
de s'attarder pendant deux heures sur la beauté d'un paysage, les
japonais peuvent aussi créer les ovnis les plus provocateurs et
les plus déjantés. Parmi les plus connus, il y a Battle
Royale, un film où le gouvernement japonais capture une classe
de quarante-deux écoliers sur une île déserte et les
force à s'entre-tuer jusqu'à ce qu'il n'y ait plus qu'un
seul survivant. Si les adolescents refusent de participer au jeu, ils
mourront tous.
Jamais les Etats Unis ou la France n'auraient pu faire un film pareil.
Brutal, violent, le film dépasse toutes les limites de la moralité
avec des enfants, sous couvert d'un "jeu à échelle
humaine" où une animatrice explique les règles en souriant
et en sautillant avec enthousiasme.
En bref, le cinéma japonais est capable de tout et reflète
parfaitement à mes yeux la dualité d'une civilisation qui
oscille entre tradition et modernité. Des problèmes de société
ressortent sur la pellicule : le travail qui prend toute la place dans
la vie des hommes (il n'est pas rare au Japon de rester au bureau jusqu'à
minuit ou plus), la soumission des femmes à la maison, la révolution
culturelle entamée par la nouvelle génération, etc...
Quels films voir au festival Kinotayo ?
Le festival devait projeter le dernier film de Kore-Eda I wish, mais
celui-ci a malheureusement été déprogrammé.
Ne restent plus que des films moins connus. Certains disent que le programme
est anecdotique pour cette 6e édition du festival, mais on trouve
parfois de très jolies surprises là où ne les attend
pas. Pour ma part, il m'a été donné la chance d'assister
à l'ensemble du festival. Mes horaires de boulot limiteront le
nombre de films que je pourrai aller voir mais après avoir décortiqué
le programme, je mets les films suivants de côté :
Guilty of Romance (2011), de Sion Sono
Synopsis
:
Izumi est mariée à un célèbre romancier. Lassée
de sa vie monotone, elle décide de suivre ses désirs et
accepte de poser nue et de simuler une relation sexuelle devant la caméra.
Bientôt, elle rencontre un mentor et commence à vendre son
corps à des étrangers, tout en restant chez elle une parfaite
femme au foyer. Un jour, le corps dune femme sauvagement assassinée
est retrouvé dans le quartier des love hotels. La police essaie
de comprendre ce qui sest passé. Dernier film de Sion Sono,
Guilty of Romance clôt sa "saga de la haine", après
Love Exposure et Cold Fish.
Pourquoi ce film ?
Sion Sono est un réalisateur connu et reconnu au Japon, et ne connaissant
personnellement pas son oeuvre, c'est l'occasion de voir le style du monsieur
sur grand écran. Provocateur et imaginatif, le réalisateur
sait faire parler de lui au Japon et à l'étranger.
Railways (2010), de Yoshinari Nishikori
Synopsis
:
Hajime Tsutsui a 49 ans et travaille dans une grande entreprise. Il vient
de recevoir une nouvelle promotion. Néanmoins, il na jamais
accordé la moindre attention à sa famille: sa femme et sa
fille sont de plus en plus distantes. Un jour il reçoit un coup
de fil qui lui annonce que sa mère, qui vivait à la campagne,
est hospitalisée. Au même moment il apprend quun ami
de longue date est mort dans un accident. Hajime retourne dans sa ville
natale pour la première fois depuis des années, et commence
à réfléchir sur le sens de son existence.
Pourquoi ce film?
Lauréat du festival Kinotayo 2010, Railways aborde un sujet typique
de la civilisation japonaise : la place de l'homme dans sa famille et
l'importance qu'il accorde à son travail, quitte à délaisser
tout le reste. Comme mentionné plus haut dans cet article, le retour
aux sources et à l'essentiel est un thème cher aux artistes
japonais.
Into The White Night (2011), de Yoshihiro Fukagawa
Synopsis
:
En 1980, un prêteur sur gages est retrouvé assassiné
dans un immeuble abandonné. Lenquête de la police se
clôt après le suicide de Fumiyo, la principale suspecte.
Sasagaki, linspecteur chargé de lenquête, nest
pas convaincu et reste hanté par limage de la fille de la
suspecte, Yukiho, enfant de dix ans à la maturité étonnante
et Ryôji, fils de la victime au regard sombre. Quelques années
plus tard, de mystérieux incidents surviennent dans lentourage
de Yukiho et Ryôji. Linspecteur Sasagaki se retrouve lui-même
menacé de mort et décide de reprendre lenquête
là où elle sétait arrêtée dix-neuf
ans auparavant.
Pourquoi ce film ?
Le genre policier ne me semble pas très répandu au Japon
(mais je me trompe peut-être ?). La durée du film me fait
un petit peu peur (2 heures 30 pour un film qui, parait-il, est assez
lent) mais il peut être intéressant de découvrir un
genre différent.
When I Kill Myself (2011), de Ryô Nakajima
Synopsis
:
Pour faire face à laccroissement alarmant du nombre de suicides
des jeunes, le gouvernement met en place un projet visant à comprendre
ce qui les pousse à ce geste. Des enfants sont choisis pour servir
de cobayes, se faisant implanter un explosif dans le cur. Placés
sous surveillance, ils disposent dun bouton qui leur permet de déclencher
lexplosif à tout moment. Quinze ans plus tard, seuls six
cobayes ont choisi de rester en vie. Un agent du gouvernement est transféré
comme gardien dans létablissement où ils sont enfermés.
Très vite, celui-ci se lie damitié avec eux. Mais
bientôt, les cobayes commencent à se donner la mort les uns
après les autres.
Pourquoi ce film ?
Avec ses airs de Battle Royale, le film promet encore une fois de plonger
dans des questionnements dérangeants et d'aller jusqu'au bout de
son concept. Reste à voir s'il fait aussi bien que son prédécesseur
ou s'il se situe en pale copie du genre.
Informations pratiques :
Le programme complet du festival : Programme
du Festival Kinotayo 2011 (ou en pdf).
Accès : Festival ouvert à tous
Tarifs : 4€, ou 3€ tarif réduit
Lieux : Plusieurs cinémas particient à l'événement
en France. L'essentiel des projections aura lieu à la Maison de
la Culture Japonaise à Paris, dans le 15e arrondissement - métro
Bir-Hakeim (ligne 6) ou RER Champs de Mars Tour Eiffel (RER C).
Posté par Florence,
le dimanche 6 novembre 2011, à 22h13
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